Publié le 23-12-2025
Revenir en Tunisie : Pourquoi le cœur dit OUI mais la réalité freine avec un NON
Ils vivent à Paris, Montréal ou Dubaï. Ingénieurs, médecins, chercheurs ou freelances, ils ont quitté la Tunisie avec un rêve d’avenir. Mais une question les accompagne, persistante et intime : et si je rentrais en Tunisie ?

C’est à cette interrogation que répond une enquête inédite menée en mai et juin 2025 auprès de 1 041 Tunisiens résidant à l’étranger. Une étude qui explore trois dimensions clés du rapport de la diaspora à son pays d’origine : le désir de retour, la volonté d’entreprendre et les obstacles perçus.
Le retour définitif reste minoritaire.
Seuls 20 % des répondants affirment envisager avec certitude un retour durable en Tunisie. À l’inverse, 59 % ne souhaitent pas rentrer, tandis que 21 % demeurent indécis. Pourtant, l’attachement au pays reste profond. 56 % des expatriés reviennent plusieurs fois par an et 35 % au moins une fois chaque année. Une relation faite de va-et-vient, où le lien affectif persiste malgré la distance.
Lorsqu’ils envisagent un retour, les motivations familiales arrivent en tête pour 32 % des sondés. Viennent ensuite l’entrepreneuriat (24 %) et la retraite en Tunisie (21 %). L’envie de créer et d’investir apparaît ainsi comme un levier stratégique du retour.
Cette aspiration entrepreneuriale s’appuie sur plusieurs facteurs : un capital humain hautement qualifié formé à l’étranger, un écosystème entrepreneurial naissant avec des incubateurs et des dispositifs de financement, et surtout une volonté forte de contribuer au développement du pays. D’ailleurs, parmi les expatriés ayant déjà participé à des initiatives en Tunisie, 63 % envisagent de renouveler l’expérience.
Mais l’enthousiasme se heurte à des réalités perçues comme contraignantes. L’étude identifie plusieurs freins majeurs au retour.
En tête, un marché du travail jugé rigide par plus de 60 % des répondants, marqué par le manque d’emplois qualifiés et des salaires peu compétitifs. S’y ajoutent les difficultés à entreprendre pour 69 % des sondés et la lourdeur des démarches administratives, pointée par 62 % d’entre eux.
D’autres préoccupations pèsent également dans la balance, notamment la qualité de vie (64 %) et le système fiscal et réglementaire (58 %). Autant de facteurs qui alimentent l’hésitation entre désir de retour et prudence rationnelle.
Pourtant, des leviers clairs émergent pour inverser la tendance. 83 % des expatriés jugent très attractives des procédures administratives simplifiées, 79 % appellent à une simplification des règles bancaires et de change, et 76 % souhaitent une garantie de protection sociale à leur retour. Des attentes qui traduisent une demande de clarté, de stabilité et de confiance.
En filigrane, cette enquête dessine une véritable feuille de route pour la Tunisie : moderniser le marché du travail, valoriser les compétences acquises à l’étranger, adapter les politiques salariales et simplifier l’environnement administratif et fiscal.
Au-delà des statistiques, ce sont des parcours de vie, des projets et des espoirs qui s’expriment. Autant de talents en suspens, prêts à reconnecter leurs racines à leur avenir, si les conditions du retour deviennent enfin une réalité tangible pour la diaspora tunisienne.
