Publié le 11-12-2025
Thouraya Lakoud :La résilience de l’économie tunisienne progresse, mais à un rythme modéré
Lors de son intervention dans le cadre de « Parlons Éco » du projet Savoirs Éco, Thouraya Lakoud, experte à l’Institut Tunisien de la Compétitivité et des Études Quantitatives (ITCEQ), a présenté une analyse approfondie de la résilience de l’économie tunisienne entre 2000 et 2024.

Une étude qui met en lumière la capacité du pays à absorber, à se relever et à s’adapter face aux chocs successifs qui ont marqué les deux dernières décennies.
Une économie soumise à des turbulences inédites
Mme Lakoud a d’emblée rappelé que l’économie tunisienne a traversé plusieurs chocs majeurs : crise financière de 2008, transition politique post-2011, crise sanitaire liée au Covid-19, puis aggravation des tensions géopolitiques et climatiques.
Ces perturbations ont eu un impact direct sur la capacité du pays à se redresser.
L’analyse menée par l’ITCEQ montre notamment un allongement du temps de récupération économique :
-
Après la crise financière de 2008, l’économie avait retrouvé son niveau initial en un trimestre.
-
Après la pandémie de Covid-19, il a fallu 19 trimestres, soit près de cinq ans, pour revenir au PIB de 2019.
Un signal clair d’un affaiblissement de la résilience face à des chocs de plus en plus intenses et fréquents.
Absorption, récupération, adaptation : une économie comme un matériau élastique
Pour illustrer la notion de résilience, Mme Lakoud a proposé une métaphore parlante : celle du matériau élastique.
-
Capacité d’absorption : lorsqu’on frappe légèrement un matériau, il se redresse rapidement.
Ainsi, une économie résiliente parvient à maintenir ses fonctions de base malgré un choc. -
Capacité de récupération : si le choc est plus fort, le matériau s’enfonce, nécessitant du temps pour retrouver sa forme.
L’économie doit alors disposer des ressources et des mécanismes nécessaires pour restaurer ses fonctions. -
Capacité d’adaptation : sous un choc très violent, la matière se déforme durablement et doit se transformer.
De même, une économie doit innover, se restructurer et se réinventer pour rebondir.
Construire un outil pour mesurer la résilience
Afin de mieux comprendre et anticiper les vulnérabilités, l’ITCEQ a construit un cadre conceptuel adapté au contexte tunisien, articulé autour de quatre dimensions déterminantes :
-
Autonomie économique et financière
-
Capacité de production
-
Cohésion sociale
-
Gouvernance
Ces dimensions ont été analysées selon les trois capacités de résilience : absorption, récupération et adaptation.
Grâce à ce travail, l’institution a élaboré deux indices synthétiques de résilience, calculés pour la période 2000–2023 et comparés à un échantillon de 38 pays afin de positionner la Tunisie sur la scène internationale.
Une progression, mais encore insuffisante
Les résultats montrent que la résilience économique de la Tunisie a progressé, passant d’un indice de 0,35 à 0,55, soit une amélioration notable mais modérée, au regard du contexte global.
Cette progression a été principalement portée par :
-
la capacité de production,
-
la cohésion sociale,
tandis que la gouvernance n’a joué qu’un rôle plus limité dans ce renforcement.
Un outil stratégique pour anticiper les défis futurs
En conclusion, Mme Lakoud a insisté sur la nécessité de mesurer régulièrement la résilience afin de mieux détecter les défaillances, anticiper les crises futures et renforcer la préparation du pays face à un environnement international de plus en plus instable.
