Publié le 09-06-2025

La Tunisie récupère plus de 400 000 comptes bancaires dormants : le vôtre en fait-il partie ?

L’État tunisien a récemment lancé une vaste opération de récupération de plus de 400 000 comptes bancaires inactifs, laissés sans aucune opération pendant plus de 15 ans. Cette mesure s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la loi de finances 2025.



La Tunisie récupère plus de 400 000 comptes bancaires dormants : le vôtre en fait-il partie ?

Longtemps attendue, cette réforme repose sur un ajustement légal qui permet à la trésorerie générale de l’État de transférer à son profit les comptes dits "dormants", qu’il s’agisse de comptes courants, d’épargne ou d’investissements, à condition qu’aucune opération initiée par le titulaire n’y ait été enregistrée depuis 15 ans.

Selon l’économiste et expert financier Sofiane Oulimi, cette mesure « n’est pas une invention tunisienne ». Elle s’inspire directement du modèle français où les fonds sont transférés à la Caisse des Dépôts et Consignations. Les titulaires ou leurs ayants droit disposent ensuite d’un nouveau délai de 15 ans pour les réclamer.

Fait marquant : plusieurs banques tunisiennes ont déjà publié des listes comprenant plus de 140 000 comptes concernés, ouverts au nom de particuliers comme d’entreprises. Les montants exacts impliqués ne sont pas communiqués, mais des estimations non officielles parlent de centaines de millions de dinars potentiellement récupérables.

Comment se déroule le transfert ?

En vertu de la nouvelle loi, les banques ont l’obligation d’avertir les clients par écrit de l’imminence du transfert. Elles doivent également publier les noms des titulaires concernés dans le Journal officiel des annonces légales. Sans réponse sous 30 jours, les fonds sont automatiquement reversés à la trésorerie publique.

Et les comptes des enfants ou des mineurs ?

Dans le cas des comptes ouverts au nom de mineurs, le décompte des 15 années ne débute qu’à partir de leur majorité, soit 18 ans. Cela signifie que certains comptes peuvent ne pas être concernés avant 30 voire 35 ans après leur ouverture.

Quelle est la valeur de ce "trésor oublié" ?

En l’absence de données transparentes, la comparaison avec la France offre un repère : en 2016, plus de 3,7 milliards d’euros issus de 6,5 millions de comptes inactifs y ont été récupérés. Si l’on applique cette logique à l’échelle tunisienne, le potentiel de récupération pourrait atteindre plusieurs centaines de millions de dinars.

Procédures complexes, information insuffisante

En l'absence d’une plateforme numérique centralisée permettant aux citoyens de vérifier s’ils sont concernés, la seule solution reste la consultation manuelle du journal officiel ou le recours direct à leur banque.

« En France, une simple requête en ligne suffit pour savoir si l’on est titulaire d’un compte inactif. En Tunisie, le manque de digitalisation freine considérablement la restitution des fonds à leurs propriétaires légitimes », déplore Sofiane Oulimi.

Une réforme équitable ou une appropriation silencieuse ?

Certains y voient une avancée vers plus de justice financière et une mobilisation salutaire de ressources dormantes pour les finances publiques. D'autres craignent que des citoyens, mal informés ou sans accès aux canaux officiels, ne perdent leurs économies sans même le savoir.

Chaque Tunisien – ou membre de la diaspora – est invité à vérifier s’il détient, ou si un proche détient, un compte oublié. Car derrière un simple compte ouvert dans les années 1980 ou 1990, se cache peut-être aujourd’hui une véritable fortune oubliée.



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