Publié le 05-10-2022

POUR SAUVER L’OCÉAN D’AUJOURD’HUI ET PRÉVOIR CELUI DE 2050


Animés par leur engagement océanique, leur expérience internationale et leur volonté de travailler ensemble à une vision à 360°, OCEAN 2050, un groupe d’expert(e)s, scientifiques, représentant(e)s économiques, associatifs et politiques, s’est réuni le 23 septembre 2022 à l’initiative de la Saison Bleue lors de la 5ème édition du Forum Mondial de la Mer à Bizerte, en Tunisie, pour produire une feuille de route prospective sur l’Océan en 2050 ainsi qu’un premier plan d’actions.
 



POUR SAUVER L’OCÉAN D’AUJOURD’HUI ET PRÉVOIR CELUI DE 2050

En cette année 2022, l’Océan, fragile bien commun au cœur du système planétaire et de nombreux enjeux globaux, a été placé de manière inédite en haut de l’agenda international. Du One Océan Summit de Brest, de Our Océan à Palau à la Conférence Océan des Nations Unies de Lisbonne, en passant par les négociations de l’Organisation mondiale du commerce sur les subventions néfastes et celles onusiennes sur la haute mer à New York et les grands fonds marins à Kingston, l’urgence, l’état de dégradation et les menaces auxquels l’Océan se trouve confronté ont été amplement établis.
Des engagements ont été exprimés par certains acteurs maritimes au plus haut niveau, des avancées ont été accomplies, souvent sous la pression des scientifiques, de la société civile, des populations les plus exposées, de la jeunesse et d’organisations non gouvernementales.

Cependant, la communauté internationale est encore très loin d’avoir mis en œuvre un plan d’actions concerté, des solutions collectives et des réponses concrètes.
L’Océan ne peut pourtant plus attendre. Pour freiner ou inverser des scénarios globalement critiques, dans un monde incertain aux crises concomitantes, c’est donc à une véritable obligation de résultats et à une accélération de l’agenda international que devra répondre la prochaine conférence des Nations Unies sur l’Océan, prévue pour se tenir en juin 2025 en France, Co organisée avec le Costa-Rica.
En 2050, nous serons 10 milliards d’habitants , la moitié d’entre nous vivrons à moins de 75 km d’un littoral dont la proximité représentera autant d’opportunités que de menaces. 80% de la population mondiale habitera les continents africain et asiatique qui font déjà face à une explosion démographique.

Les écarts de développement économique et social, tout comme les inégalités avec les nations les plus vulnérables face au dérèglement environnemental, n’auront pas cessé de s’accroître.
Si l’Océan limite en partie le réchauffement climatique, absorbant plus de 25 % du CO2 émis chaque année par l’Homme et plus de 90 % de la chaleur résultant des émissions de gaz à effet de serre, cet immense écosystème continu de la planète pâtit déjà gravement, voire irréversiblement, des changements globaux issus des pressions anthropiques (changement climatique, surexploitation des ressources, pollution, artificialisation, etc.).

En plus de ces crises affectant le milieu marin, en surface, en profondeur, et sur l’ensemble du littoral mondial, l’Océan est également le principal théâtre de compétitions et conflits économiques, stratégiques, énergétiques et sécuritaires, illustrés entre autres, par le réarmement massif des grandes marines nationales et par des migrations, notamment sociales et climatiques, aussi inéluctables que dévastatrices.

D’ici 2050, la proportion des revenus de la mer dans les PIB des États aura fortement crû. L’Union européenne s’est engagée à éradiquer à cette échéance les émissions nettes de gaz à effet de serre et à fortement développer sa production d’énergies marines renouvelables, notamment éoliennes.

Néanmoins, la transition vers une économie bleue véritablement durable tarde à se concrétiser, comme en témoignent l’appétence pour l’exploitation des ressources en haute mer, dans les grands fonds marins et les zones polaires, notamment en Arctique.

Si les acteurs du transport maritime s’emploient à décartonner celui-ci en 2050, les investissements ne sont pas à la hauteur des enjeux. La répartition des bénéfices de ces importants revenus océaniques reste par ailleurs très inéquitable.

En 2050, 1 milliard de personnes, vivant dans des zones littorales basses, devront ou songeront à se déplacer, victimes de la montée des eaux et d’épisodes de submersion entraînés par des tsunamis, des ouragans et des typhons.

10% des ports de commerce du monde se trouveront fortement exposés à des phénomènes extrêmes qui s’attaqueront également aux bateaux et à leurs équipages pour un coût de 10 milliards de dollars par an à l’horizon 2050. Un quart de l’humanité, en particulier dans les pays les moins développés, ne disposera toujours pas de système d’alerte adapté aux menaces locales. Les primes d’assurance liées aux activités maritimes et à la vie littorale auront quintuplé.

Quant au stress hydrique, l’Organisation mondiale de la santé assure qu’il affectera en 2050 quatre habitants sur dix, soit quatre milliards d’individus. Le marché de la désalinisation aura alors plus que triplé pour un montant estimé à 50 milliards de dollars par an.

Ensemble, grâce à la présentation de plusieurs enquêtes et études réalisées auprès de plus de 500 grands témoins ou acteurs, notamment celle proposée par le Plan Bleu pour la Méditerranée en 2050, et à l’examen de scénarios économiquement et socialement acceptables, modélisations, hypothèses et chemins de transition et de sobriété engagés depuis plusieurs années, nous avons donc envisagé l’Océan de demain, celui de 2050, ses atouts et faiblesses, ses opportunités et menaces ainsi que les actions à entreprendre urgemment pour un futur soutenable et favorable au vivant.
Dans la mise en œuvre de l’Objectif de développement durable 14 (« Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable »), OCEAN 2050 adresse un message d’alerte à tous les acteurs concernés sous la forme d’une pressante recommandation de coopération internationale accrue à tous les niveaux.

Ce « choc de coopération » paraît d’autant plus indispensable et urgent que les approches nationales, sectorielles et souvent tournées vers l’exploitation, renforcent le « choc de polarisation » à l’échelle mondiale, rendant de plus en plus complexe une vision partagée et solidaire de l’Océan bien commun.

Nous appelons donc les États, les organisations internationales et non gouvernementales, le monde de la recherche scientifique, de la surveillance de l’environnement, les entreprises, les investisseurs, les usagers de la mer et la société civile à travailler ensemble à construire un Océan sûr et en bonne santé en 2050.

Cette Déclaration de Bizerte, appelant à un choc de coopération, marque la détermination de ce groupe OCEAN 2050 qui s’ouvrira à tous les acteurs internationaux dont l’expertise permettra d’affiner les scénarios dans les différentes branches .

Dans ce cadre, fort d’une première série de recommandations ci-joint, le Forum mondial de la mer de Bizerte se propose désormais d’être un « forum de coopération pour le futur de l’Océan » et de mesurer, lors de chacune de ses éditions annuelles, les avancées accomplies comme les difficultés et blocages auxquels la communauté internationale n’aurait pas su répondre.

A cet effet, un premier rapport spécial du Groupe d’experts OCEAN 2025 sera présenté à l’occasion de la 6ème édition du Forum mondial de la Mer de Bizerte en septembre 2023.
Reprenant l’image de l’étoile de mer, s’appuyant sur les cinq grandes thématiques portées par l’Union Européenne au sein de la Mission Star Fish « Régénérer notre océan et nos eaux 2030 », c’est autour de ces cinq branches que s’organisera le travail du groupe OCEAN 2050.


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