Publié le 06-03-2018

Rached Ghannouchi écrit une chronique pour Le Monde

A l'occasion de la célébration du 2eme anniversaire de la Révolution, le leader du Mouvement islamiste Ennahdha a rédigé un article paru dans le Monde pour son édition du 14 Janvier 2013. Rached Ghannouchi a indiqué, dans son article, qu’il était optimiste quant au devenir de la Tunisie assurant que « le peuple Tunisien est devenu le véritable acteur de son histoire ».



Rached Ghannouchi écrit une chronique pour Le Monde

Voici l'intégralité de l'article écrit par Rached Ghannouchi:

« La Tunisie célèbre, le 14 janvier, le deuxième anniversaire du soulèvement de son peuple et de sa jeunesse contre la dictature. Grâce au sang de ses martyrs ainsi qu'aux sacrifices de générations de Tunisiens, elle est engagée dans un processus de fondation d'un régime et d'une société démocratiques. Il s'agit d'un processus, certes difficile et complexe, mais qui est inéluctable. Malgré les difficultés, et avec beaucoup de détermination et d'intelligence créative, le peuple tunisien devient le véritable acteur de son histoire. Il est engagé dans une expérience qui sera un modèle de réussite démocratique.

Les Tunisiens ont surtout réussi à démontrer la possibilité du rapprochement, de la coopération et du partenariat entre islamistes modérés et laïques modérés. Si l'opposition à la répression et à la dictature a permis un tel rapprochement avant le 14 janvier 2011 (comme l'a montré, par exemple, le collectif du 18 octobre 2005), nous sommes aujourd'hui, laïques et islamistes, engagés dans la construction des fondations de la démocratie en Tunisie. Ce partenariat demeure la seule voie pour assurer un progrès durable et une démocratie stabilisée, unifiée autour de la réalisation des véritables objectifs nationaux de la Tunisie.

La réussite de cette construction nécessitera aussi de trouver des solutions créatives aux nombreux défis qui se posent à la démocratie balbutiante en Tunisie : la bonne gestion de l'explosion des revendications sociales et politiques après des décennies de répression et de verrouillage de la société ; la fondation d'un Etat de droit qui garantit les libertés individuelles et collectives ainsi que l'application de la loi ; la construction d'un consensus national qui évite la polarisation politico-idéologique et la pure compétition partisane sans neutraliser le politique ; et l'édification d'un modèle de développement égal et homogène qui assure la prospérité des régions de la Tunisie. Je suis convaincu que les Tunisiens pourront affronter courageusement ces défis, comme ils ont réussi à se lever collectivement contre la dictature.

La fin de "l'exception arabe"

La révolution tunisienne a non seulement transformé le visage de la Tunisie, mais elle a également déclenché un mouvement qui s'est étendu à l'ensemble des pays arabes. Ce processus est réel et relève de véritables mutations qui marquent aujourd'hui le monde arabe. Il ne relève pas uniquement de la proximité géographique des pays arabes, ni seulement de la communauté linguistique et culturelle qui les caractérise, mais aussi de la conscience profonde et partagée de la crise politique qui les paralysait.

Le "printemps arabe" est la réponse à cette longue crise. C'est un véritable séisme politique qui transforme le visage de la Tunisie et de l'ensemble de la région du monde arabe. Il ouvre aussi une nouvelle page dans les relations extérieures de cette région avec le monde.

Le "printemps arabe" met, en effet, fin à la vieille doctrine de "l'exception arabe" et au lien supposé évident entre le soutien aux régimes autoritaires et la stabilité dans le monde arabe. Il est devenu, au contraire, clair que seule la construction d'une véritable démocratie dans le monde arabe garantira une stabilité durable. Nous ne sommes qu'au début d'un processus long et difficile, mais qui se traduira certainement par plus de prospérité et de stabilité pour la région et le monde entier.


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