Publié le 06-03-2018

Borj Boukhris à Carthage, son passé, son triste présent et peut-être son futur…

Le site de Borj Boukhris comprend une ancienne résidence d’été datant de la deuxième moitié du XIXe siècle ainsi qu’un domaine agricole de 11,5 hectares.



Borj Boukhris à Carthage, son passé, son triste présent et peut-être son futur…

Il s’agit d’un vaste terrain anciennement agricole dont l’organisation et la typologie gardent encore les traces des activités agraires. Cette vocation semble remonter à l’époque romaine car le domaine de Borj Boukhris est situé dans la zone de cadastration agricole romaine de Carthage. Cet  emplacement laisse supposer que le site appartenait, dans l’antiquité, à une zone rurale qui n’était donc pas urbanisée et qui comprend très peu de bâtis. C’est probablement la raison pour laquelle ce site, pourtant situé à Carthage, n’a jamais fait l’objet de campagnes de fouille. Il semblerait que le site ait connu plusieurs étapes successives de construction selon les différents occupants qui ont habité ce lieu.

De l’histoire contemporaine

Abandonné depuis de nombreuses années, aujourd’hui le site de Borj Boukhris est complètement délabré et la demeure est fortement endommagée. Cette dernière avait pourtant fait l’objet, en 2009, de travaux de restauration dans le cadre d’un projet de musée lancé par le Ministère de la Culture en collaboration avec les Ministères du Tourisme, de l’Agriculture et de l’Equipement qui n’a pas abouti. Les travaux prévus ne tenaient pas compte des spécificités du site et de son caractère patrimonial. Ces travaux ont été arrêtés après le 14 janvier 2010. Heureusement, car à l’époque, le projet du musée du paysage agraire de la Carthage antique, supervisé directement par la Présidence de la République, n’était qu’un prétexte pour aménager  le site avant de l’attribuer à la famille Trabelsi qui allait en faire un projet commercial. En 2012, une mission de l’UNESCO a déclaré le site en péril, devant bénéficier d’un aménagement prioritaire (cf. rapport de la mission conjointe UNESCO / ICOMOS, rédigé en 2012). Rappelons ici que le PPMV de Carthage (Plan de Protection et de Mise en Valeur) qui permettra sans doute de sauver Carthage et ses terrains de la spéculation et des constructions anarchiques n’est toujours pas en vigueur. Il est pourtant prêt depuis des années et il n’attend qu’à être examiné et validé.

Malheureusement le budget alloué au projet de restauration et d’aménagement de Borj Boukhris entamé en 2009 a été annulé et les moyens actuels du Ministère de la Culture ne permettent pas de lancer de nouveaux travaux pour sauvegarder le site et le valoriser comme c’est le cas de plusieurs autres sites et monuments historiques menacés de disparition.

Une nouvelle page d’histoire, à écrire

En décembre 2014, le Ministère de la Culture, conscient des limites de ses ressources et de l’urgence d’intervenir sur des monuments historiques menacés, a lancé un appel à projet, publié dans les journaux locaux en bonne et due forme, afin de procéder à la mise en concession d’un certain nombre de sites et monuments historiques, dont Borj Boukhris. Cet appel a été considéré comme une première dans le secteur culturel en Tunisie puisqu’il associe des acteurs privés dans la gestion et le développement de la culture et du patrimoine en les incitant à investir dans ce domaine.

Parmi les projets proposés pour Borj Boukhris, il y a celui du Centre d’art présenté par la Fondation Kamel Lazaar. L’intérêt de ce projet est double : restaurer un monument historique sous l’égide du Ministère de la Culture et doter la Tunisie de son premier centre d’art contemporain dédié aux artistes du Maghreb et du Moyen-Orients. Seul un bâtiment neuf, discret et contemporain viendrait dialoguer avec le monument existant et contribuerait à sa mise en valeur. L’ensemble sera aussi complété par un parc thématique inspiré des aménagements paysagers antiques et ouvert à un large public familial. À travers ce projet et en accord avec les différents acteurs (associations de sauvegarde, Ministères, etc.), la Fondation Kamel Lazaar souhaite ouvrir sa collection riche de plus de 1000 œuvres d’artistes originaires de la région MENA* au public. Rappelons ici que le futur musée d’art prévu à la Cité de la culture, toujours inachevé et en quête de financement, est exclusivement réservé aux artistes tunisiens et que le projet du Centre d’art est conçu dans un esprit de complémentarité à cette future institution.

Pour Soumaya Gharsallah-Hizem et Bechir Souid Architectes et muséologues, le projet de la Fondation Kamel Lazaar serait considéré comme un projet pilote car il marquerait le début d’une nouvelle politique culturelle, associant la société civile et les opératuers privés dans la gestion du patrimoine, une initiative inédite en raison de l’absence chronique de politique claire pour promouvoir le patrimoine et la culture.




 


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