Publié le 06-03-2018

Selon le PDG de Tunisair, Airbus aurait arrosé le gendre de Ben Ali !

Tunis. Le 5 Avril 2011. Le PDG de la compagnie nationale Tunisair, Nabil Chettaoui , en poste depuis plus de quatre ans,  devenu depuis le  départ de Ben Ali une sorte de cocotte minute sous pression, déclare dans une interview au quotidien « Le temps » que des commissions ont sans doutes été versées pour finaliser l’acquisition d’une quinzaine d’avions ( des airbus exclusivement).



Selon le PDG de Tunisair, Airbus aurait arrosé le gendre de Ben Ali !

Le franc PDG a pris soin toutefois de préciser que les subsides  n’avaient, ni transité, ni été conclus de son fait.  Attitude toute à son honneur et  profil (bas)  de circonstance. Mais qui ne correspondent  malheureusement pas à la description du personnage telle que brossée par  les journalistes  Nicolas Beau, et Catherine Graciet dans leur ouvrage d’investigations « La Régente de Carthage ». Et puis Google ne pardonne pas :  en tapant « Chettaoui + Corruption », il est renvoyé 2100 résultats.

2008. Sarkozy,  l’hyper président, omni-vendeur,  avait, lors de sa visite fort amicale à Ben Ali paraphé le contrat relatif à la plus grosse commande jamais placée par Tunisair : 2 milliards d’euros, dont trois  A350WXB, trois A330-200 et surtout un bel A340-500, le must des avions présidentiels.  Or, de tous temps la compagnie tunisienne a eu pour politique de partager sa flotte entre Boeing et Airbus. Les (quelques) gros chez l’un, les ( nombreux) petits chez l’autre.  Voilà, que d’un coup, Tunisair, question de communalité de flotte sans doute, vient de se muer en All-Airbus-Fleet. 

Excellent travail des vendeurs Airbus ? La rue tunisienne en doute, d’autant plus que les initiés de la compagnie en attribuent le mérite exclusif au gendre de Ben Ali, dernier arrivé à la cour des réjouissances. Sakhr Materi, le nouveau tycoon,  aujourd’hui en fuite au Qatar.  Peu discret, coaché par l’éminence grise et ministre conseiller du Président, Ben Dhia ( en prison) ,  il a été, avec Trabelsi ( en fuite au Canada) , le plus grand prédateur de l’économie tunisienne.

Première coïncidence, Ben Dhia, est un très fréquent voyageur à destination de Toulouse :  il est marié à une ressortissante  française de la ville rose, ses deux fils y sont installés, et est aussi fort introduit à l'Université Paul Sabatier que chez l’avionneur local.

Deuxième coïncidence,  Habib Fekih, un des dirigeants d’Airbus est tunisien. C’est même un ancien de Tunisair, recruté par le Président du GIE Airbus de l’époque, natif de Tunisie, Jean Pierson. Les affinités sont apparues suite à l’achat baroque, en 1982, par la compagnie tunisienne d’un A300-B4FFCC. Cet avion inconnu, hybride,  fabriqué à moins d’une douzaine d’exemplaires au total, a rejoint Tunis presqu’au moment où Fekih la quitte. Dans des circonstances douteuses, selon ses ex-collègues.  Réfugié à Toulouse, il  entame sa carrière de vendeur, chez Airbus, par la couverture du secteur Afrique du Nord, puis Moyen-Orient.  

Petits services entre amis et surtout entre toulousains d’adoption, Fekih est rapidement amnistié, fin des années 80, par Ben Ali qui le reçoit même en audience officielle.  Une épine de moins dans le pied, ça motive son bonhomme : Fekih  devient Executive Vice Président d’Airbus, chargé du Business developpement .   Domaine où il se révèle doué puisqu’Airbus reconnait lui devoir, entre autres,  les marchés Qatar Airways et Emirates.

C’est presque vers la même période que Chettaoui prend les rênes de Tunisair. Il doit, lui, sa nomination au beau-frère de Ben Ali.  En tant que DGAC et PDG de l’Office des aéroports, il a longuement pratiqué et côtoyé  Trabelsi, notamment pour la création de la compagnie Karthago Airlines, et surtout pour la réalisation du projet  de l’aéroport d’Enfidha,  auquel  Chettaoui  doit son ascension. 

Dés le début de la révolution du jasmin, Chettaoui fait face à une vague d’accusations sans précédents. Le marché, le nombre et les modalités de la commande groupée d’avions est la première chausse-trappe posée sur la table.  Les syndicats et les cadres s’excitent : il faut réétudier la flotte nécessaire et  préparer la relance de Tunisair. D’accord.

Le ministre de transition, Braïm Yassine, technocrate inexpérimenté, déjà auteur d’une bourde historique en entérinant, au lendemain de sa prise de fonction, l’internalisation des filiales diversifiées de Tunisair, se raccroche à  Chettaoui  envers et contre tout. Il se laisse donc convaincre par celui-ci de mettre en place une Commission Stratégique pour évaluer la situation de la compagnie.  Et même de faire nommer une personnalité indépendante  à sa tête.  Qui ? Habib Fekih. Le monde (des Sopranos) est petit.  Le même, pour faire simple, qui a œuvré à la vente des avions dont on chercherait à se défaire, et déniché, accessoirement,  l’A340-500 du Président déchu.

Ce sera d’autant plus facile pour lui de préconiser l’annulation de quelques gros-porteurs en surnombre. Et bien, sûr, éclairer, en passant  les membres  de la Commission sur les mécanisme de vente utilisés.

Mecanisme ou (retro)-commissions. C’est Chettaoui qui le dit. Gentleman, il prend, par ailleurs, soin de dédouaner  le même dirigeant d’Airbus : «  les commissions ne passent pas par les grands directeurs  et vendeurs  du constructeur, mais par des cabinets d’avocats dument mandatés par les deux parties ». Ah,oui ?

Source : Lepost.fr


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