Publié le 06-03-2018

Interview de Jaafer Gasmi

Artiste, acteur et metteur en scène, la connivence de ses capacités surprenantes rendent possible le rêve d’un théâtre qui chante sa propre histoire. « L’un de nous » est un succès. C’est vrai mais pas pour Jaafer Gasmi soucieux d’un nouvel humour et d’un théâtre aussi moderne que humain. Son succès vaut un agenda chargé mais les minutes passées avec lui sont d’autant plus précieuses. Interview.  



Interview de Jaafer Gasmi

Artiste, acteur et metteur en scène, la connivence de ses capacités surprenantes rendent possible le rêve d’un théâtre qui chante sa propre histoire. « L’un de nous » est un succès. C’est vrai mais pas pour Jaafer Gasmi soucieux d’un nouvel humour et d’un théâtre aussi moderne que humain. Son succès vaut un agenda chargé mais les minutes passées avec lui sont d’autant plus précieuses. Interview.  

 

Quel est pour vous le vrai début ?

 

Mon vrai début était avec l’ISAD, en 1997. Le bac à la poche, on m’a orienté vers le Droit à Sfax, une branche qui ne m’intéresse pas spécialement. Puis, grâce à un parcours intéressant dans le théâtre amateur j’ai réussi à passé un teste qui m’a permis d’intégrer l’institut et de commencer réellement ma carrière artistique. Je dois aussi citer une autre expérience ultérieure, celle du clown, qui a beaucoup marqué ma vision artistique. Parce que le travail du clown est difficile par sa divergence entre la joie qu’il offre et la tristesse qu’il cache.

 

Que représente pour vous l’Acteur ?

 

C’est le rêve d’un petit enfant qui m’habite depuis toujours. C’est le sentiment que je suis une femme, en plus enceinte de beaucoup de projets, de création et de douleur. Je fais toujours une comparaison entre l’acteur et la femme. Car je pense que l’acteur qui n’intériorise pas une femme fertile qui accouche tous les jours par une césarienne, n’est pas vraiment dans la souffrance réelle de la fécondité.

 

Comment est née l’idée de « l’un de nous » ?

 

L’idée m’est venue en essayant de répondre à la question « pour qui nous faisons du théâtre ? ». L’acte théâtral exige un émetteur et un récepteur. Cela ne veut pas dire qu’on doit accepter la médiocrité commerciale sous le slogan ou le prétexte « sous la demande du public ». Cette œuvre est donc une esquisse de réponse à la question de la relation entre théâtre et public.

A tout égard, cet one-man-show n’est pas le rêve de ma vie mais plutôt un grand rêve dans ma vie. Ce qui m’a poussé à s’aventurer avec « l’un de nous » est ma peur de stagnation physique et mentale. Cette peur de mort, ou de disparition d’un certains bouleversement nécessaire à la créativité, m’a permis de prendre en pleine main mon droit et mon devoir de renouveler mes expériences et mes mécanismes de travail même si je risque la défaite. Car j’ai aussi le droit de commettre des erreurs dans mon pays et devant mon public. Le succès qui s’est ensuit ne me dit pas grande chose par rapport à d’autres rêves dans ma tête. 

 

Parlez nous un peu de vos préoccupations ontologiques ?

 

Pour vous dire la vérité je vis un conflit entre moi et moi-même. Oui ! Je me réuni avec mon moi-même régulièrement pour discuter, parler, se confier des vérités... Je lui pose la question « qu’est ce qui ne va pas ? » et elle me répond avec franchise. Nous somme toujours en conflit perpétuel, ce qui me parait important dont une mise en question pertinente et imputable à ma personnalité et ma carrière. Comme exemple, mon moi-même m’ai trouvé superficiel et débile suite à des erreurs professionnelles que je viens de faire.

 

Justement. Il y a-t-il une expérience que vous regrettez ?

 

Oui. Il y a quelques projets à la TV dont je ne suis pas convaincu du tout, essentiellement « Hannibal Fi Houmitna ».

 

Pourquoi ?

 

Parce que j’aurai pu aller plus loin dans mon rôle. J’étais comme le pêcheur qui a réuni tous les éléments de la pêche mais n’a rien capturer avec sa canne. C’était exactement mon cas puisque je n’ai pas réussi à toucher le spectateur tunisien malgré les conditions favorables que j’ai trouvé.  

 

Pouvez-vous nous citer les vraies raisons ?

 

Elles sont plutôt personnelles. Je pense que c’était à cause d’une précipitation ou d’un manque de réflexion sur le sujet.

 

A l’occasion du centenaire du théâtre, comment voyez-vous le théâtre au jour d’aujourd’hui ?

 

Le théâtre tunisien est en train de changer de peau. Le paysage théâtral s’améliore à travers la nouvelle génération qui peut donner beaucoup au théâtre si la confiance s’installe.

 

Pensez vous que le terrain est favorable pour ce courant juvénile ?

 

Je pense que fêter le centenaire du théâtre est important. Mais après ? La question de condition favorable à l’acte théâtral est importante. A ce stade, il est nécessaire de vérifier la situation actuelle du théâtre mais je préfère ne pas répondre à cette question car ça tuera la surprise de ma nouvelle pièce de théâtre.

 

Donnez nous les détails de votre nouvelle pièce ?

 

Elle s’intitule « les valises », et réuni huit acteurs qui sont Sameh Dachraoui, Salha Nasraoui, Mohamed Sassi Bouabeni, Oussama Jemii, Youssef Mars, Sameh Toukabri et Sahbi Omar. Je suis en pleins chantier depuis 2 mois et une vingtaine de jours sur le plan de la mise en scène. Mais le projet a commencé depuis plus qu’un an. Notre scénariste a beaucoup joué sur le symbolisme et la profondeur du texte qui garde pour autant son aspect souple et maniable. Cela nous a permis de laisser l’acteur intervenir puisque la pièce traite les problèmes de ce métier.

 

C’est votre première expérience en mise en scène ?

 

Non. J’ai déjà mise en scène la pièce intitulée « Bourachka Wel Flaik Wrak » qui a eu énormément de succès, il y a quatre ans, auprès de la critique.

 

Quant est ce que vous présentez l’avant première de « valises » ?

 

Normalement le 12 aout, avant la fête de la femme d’une seule journée. Mais j’ai rien programmé au niveau de la propagande parce que j’estime que l’œuvre doit s’imposer toute seule sans publicité ou soutiens de ce genre.

 

Dans ce sens, comment voyez-vous la relation entre le public et le théâtre ?

 

Je commence par donner un exemple du domaine sportif : les grandes équipes du football ne font de la publicité pour drainer tant de supporters. Ces derniers sont attirés à une équipe grâce à ses titres et victoires… vous voyez ? C’est la même méthode que le théâtre doit adopter. Certes que la relation entre public et théâtre n’est pas séduisante généralement mais la solution est très facile à réaliser. Cette question est aussi traitée dans « valises ».

 

Donc, si j’ai bien compris « valises » traitera tous les problèmes du théâtre en Tunisie ?

 

Pas tous les problèmes mais surtout la partie qui concerne l’acteur du théâtre. j’explique mieux par dire que à travers la pièce je montre que l’acteur est la seule personne qui peut ouvrir les valises de la société. Mais n’est-il pas vrai aussi que l’acteur est, à son tour, une valise de la société. Donc, pourquoi ne pas l’ouvrir et voir ce qu’elle contient ?

 

Parlant un peu du cinéma. Qu’est ce que vous pensez de votre participation à Cinécittà ?

 

Je pense que l’apport de cette pièce à ma carrière est énorme. Les gens m’ont posé la question concernant mon absence sur les plateaux du 7ème art. C’est déjà un acquit. En plus, j’ai eu la chance de voir Cannes, de travailler et de découvrir le réalisateur Ibrahim Letaif que j’admire beaucoup. D’un autre côté, j’ai découvert la réussite d’une belle complicité avec Jamel Madani.

 


Henda


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