Publié le 06-03-2018

Le pouvoir des médias

Montesquieu a bien séparé trois pouvoirs : l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Mais ce n’est pas un hasard si la presse, et les médias en général, se sont imposés de facto comme un 4ème pouvoir aussi important que les trois premiers, en ouvrant l’espace public au citoyen. Fonctions officielles : informer et communiquer (au sens général des termes). Fonctions officieuses : entre la désinformation et la manipulation des consciences, le chantier est vaste.



Le pouvoir des médias

Montesquieu a bien séparé trois pouvoirs : l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Mais ce n’est pas un hasard si la presse, et les médias en général, se sont imposés de facto comme un 4ème pouvoir aussi important que les trois premiers, en ouvrant l’espace public au citoyen. Fonctions officielles : informer (au sens général des termes). Fonctions officieuses : entre la désinformation et la manipulation des consciences, le chantier est vaste. Dernier exemple en date, les tensions entre égyptiens et algériens dont le déclencheur était un animateur à la télévision. S’en suit une campagne médiatique incontrôlable qui fait des deux peuples des ennemis, alors qu’il n’en était rien. D’ailleurs, en parlant de cela, j’ouvre une petite parenthèse pour revenir sur la controverse de la semaine précédente. J’ai remarqué à travers quelques réactions que mes propos ont été mal compris et interprétés. Je tiens à dire que loin de moi est l’idée d’attiser la haine envers les égyptiens. Je tenais juste à mettre les points sur les i concernant quelques déclarations que j’estime inacceptables.

Revenons au sujet du jour qu’est le pouvoir médiatique. Tout le monde est bien d’accord pour dire que c’est une bonne chose d’accéder à l’information, mais comment être sûr de l’objectivité des informations données ? Il faut dire que c’est loin d’être une tâche facile. En effet, à une époque où les médias occupent la quasi-totalité de notre espace social (télé, radio, presse-écrite et électronique), ils deviennent le moyen le plus efficace d’atteindre des objectifs politiques, religieux, ou autres. En ce sens, je vais m’attarder sur trois exemples différents :

Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2007      

Bâtissant sa campagne sur l’insécurité et l’immigration clandestine, Sarkozy se retrouve très bien épaulé par ses amis, patrons des groupes de médias. A coups de reportages sur les banlieues françaises qui font peur et des sans papiers qui piquent le travail des français, les médias ont bien aidé le candidat à devenir Président. C’est sûr que d’autres paramètres sont à considérer, mais la majorité des analystes politiques tendent à croire que l’image donnée par les médias : une France insécuritaire  et des immigrés qui profitent des allocations sociales,  a largement contribué à l’élection de Sarkozy, en appuyant ses discours.

Amrou Khaled :  

Il n’est pas barbu, il est juste moustachu, et il est même en costume -cravate. Cela tombe bien, il ne fait pas intégriste, mais plutôt neutre. Pourtant, il s’agit bien d’un prédicateur qui a séduit la gente féminine tunisienne et a fait voiler plusieurs de nos jeunes filles. Quand j’étais encore à la faculté, j’entendais des filles fraîchement voilées et des voilées potentielles en parler: « Mahléh aka Amr Khaled, 9adéchou seyiss ». Oui, il est seyiss, mais il sait surtout vendre ! Il suffit de deux petites larmes et le tour est joué ! A la télé, Il faut bien jouer sur l’émotion pour envahir la conscience, n’est-ce pas ? Une image médiatique très bien étudiée : Amrou Khaled est présenté en homme « moderne » (seulement en apparence), rendant le pas vers le port voile plus facile. Le prêcheur devient une icône du paysage audio-visuel, assurant une forte audience, un site web des plus visités au Moyen-Orient,  et des jeunes filles qui se voilent de plus en plus, non convaincues par les sourates du Coran qui existent depuis 14 siècles, mais hypnotisées par les belles paroles et les larmes d'Amrou Khaled. C'est évident, grâce aux pouvoir et l'influence psychologique des médias, il a pu vendre l'islam comme n'importe quel autre produit.

Georges W. Bush    

Lui alors, c’est un véritable cas d’école. Autrement dit, un cas typique de la manipulation médiatique. Comment justifier non pas une, mais deux guerres injustifiables ? C’est simple : une vaste campagne de propagande dans tous les médias. Entre anciens militaires et journalistes influents, le paysage médiatique a permis à Bush de jouir d’un appui favorable du peuple américain (dans sa majorité). On ne voyait pas une guerre en Afghanistan, mais une guerre contre le terrorisme. Bizarrement, on oublie le mot guerre, on retient celui de terrorisme. On ne voyait pas une guerre en Irak, mais des iraquiens détenteurs d’armes de destruction massive et des américains sauveteurs de l’humanité. Une grande manipulation de l’opinion publique que le New York Times a bien révélée en 2005 grâce à une grande enquête : des journalistes et des ex-militaires payés pour des reportages truqués et des informations erronées, tout y est passé pour avoir le soutien du peuple. Et cela a bien marché, Bush a rempli deux mandats présidentiels.

Bref, les exemples aussi différents qu’ils puissent paraître convergent à une seule conclusion : les médias  tendent aujourd’hui à fabriquer l’opinion. En occident, où ils représentaient la base de la démocratie, ils en deviennent presque l’illusion. Le pouvoir médiatique est si énorme qu’il en faut un cinquième pouvoir pour rééquilibrer la sphère. On peut croire que ce cinquième pouvoir est en train d’émerger grâce à Internet : c’est ce qu’on appelle le média citoyen. Mais là encore, il y a un hic: l’information étant accessible à tous, tout le monde informe et tout le monde désinforme, des cyber-communautés se construisent, l’amalgame se renforce et une société de l’information est née. Nous sommes en train de devenir surinformés, est-ce un atout ou un danger? on n'en sait rien encore... Tous les articles de Controverse

 

Sarah B.H

 

Articles liés:

Iran-Egypte: Tensions dans les médias

Tous les articles de Controverse

 


contoverse-6.jpg

Dans la même catégorie