La société civile trouve la réponse de la justice tunisienne au viol de Meriem insatisfaisante

Le verdict rendu par le tribunal de première instance de Tunis, le 31 mars 2014, dans l’affaire du viol collectif d’une jeune femme par des policiers en service n’est pas satisfaisant ont déclaré aujourd’hui l’ATFD, l’OCTT, la LTDH, l’AFJT et la FIDH. Les deux policiers accusés du viol ont été condamnés à 7 ans de prison et le troisième à une peine de deux ans de prison assortie d’une amende de 20.000 dinars pour corruption.



La société civile trouve la réponse de la justice tunisienne au viol de Meriem insatisfaisante

Les organisations signataires, constituées partie civile dans ce dossier, regrettent que ce verdict n’ait pas pris en compte les circonstances et les conséquences de ce crime d’une particulière gravité. Bien que le verdict consacre la culpabilité des violeurs et constitue ainsi un pas vers l’impunité, il s’inscrit dans la tradition déplorable du traitement général des cas de violences sexuelles par la justice tunisienne. Il illustre l’absence de toute approche globale visant à lutter contre les violences faites aux femmes et ce en dépit de l’adoption de l’article 46 de la Constitution tunisienne, aux termes duquel l’Etat doit prendre les mesures nécessaires en vue d’éliminer les violences faites aux femmes.

Considérant que le crime commis l’a été en réunion, par des agents des forces de l’ordre qui se trouvaient dans l’exercice de leurs fonctions, et dont le devoir était de protéger les citoyennes et les citoyens, dans le respect de la Loi, nos organisations font part de leur surprise quant à cette décision de justice. Alors que les dispositions du code pénal sont claires et condamnent sévèrement tout fonctionnaire public ou assimilé qui, commet une infraction en utilisant la contrainte que la loi l’autorise à exercer ou les moyens inhérents à sa fonction (article 114 du code pénal), ce verdict laisse penser que les accusés ont bénéficié de circonstances atténuantes.

La justice tunisienne n’a manifestement tenu aucun compte de la personnalité des accusés, ni de leur attitude générale de dénégation contre toutes les évidences, ni de l’absence de toute excuse prononcée en direction de Meriem, dans un contexte plus général ou celle-ci avait déjà subi une triple violence : violée par plusieurs policiers, puis blâmée par l’institution sécuritaire qui considérait la nécessité de l’accuser alors qu’elle était la seule victime, puis contrainte à une attente difficile pour obtenir que justice lui soit rendue.

Ces manœuvres et campagnes de diffamation visant à inverser les rôles et à laisser penser que la présence de la victime permet la réalisation du crime qu’elle subit ont persisté jusque dans les couloirs du tribunal.

Nos organisations saluent l’immense courage et la forte détermination de Meriem qui a osé, encouragée par son entourage qu’il faut également saluer, briser le silence autour de ce crime et affronter l’institution étatique. La voix rebelle de Meriem est un encouragement pour les victimes de viol à sortir de leur silence. Elle est une chance donnée à la Tunisie de sortir du cycle de l’impunité.

Nos organisations appellent toutes les institutions étatiques à traiter les violences sexuelles comme une atteinte grave à la dignité des femmes, à leur intégrité physique et morale et à leurs droits fondamentaux.

Nos organisations appellent les autorités à harmoniser la législation avec les engagements internationaux de la Tunisie en matière de lutte contre toutes les formes de violence et de discrimination à l’égard des femmes.

• Association tunisienne des femmes démocrates

• Ligue tunisienne de la défense des droits de l’Homme

• Organisation tunisienne de lutte contre la torture

• Association des femmes juristes tunisiennes

• FIDH - Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme
 


Communiqué
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