Publié le 06-03-2018
Une tunisienne née au Canada se confie sur le racisme vécu durant son enfance
Une tunisienne de mère algérienne, née au Canada revient sur le racisme dont elle a fait objet depuis son enfance au Canada. Un récit qui mérite d'être lu...

« Je suis née en Tunisie, d’un père tunisien et d’une mère algérienne. C’était une période difficile, la police politique était partout. Mon père avait participé à des élections législatives, il avait fait un pari démocratique et il avait été arrêté. Et quand j’avais 10 ans, on a dû quitter le pays. Pas en avion, à pied ! Ça nous a pris trois jours. On a passé deux mois en Algérie, en pleine période d’incertitude, d’attentats. Mon père avait négocié avec des passeurs, et on est ensuite arrivés en France comme réfugiés politiques. À cet âge, le choc culturel tu ne le ressens que si le contexte te le renvoie. Je me rappellerai toute ma vie du premier jour d’école. Tu sais, dans les vieilles écoles en France, il y a ces grandes estrades, et la maitresse m’avait demandé d’aller me présenter ; tout le monde devait y passer. Et il y a cette petite fille qui a dit : ‘Moi je dis pas bonjour, parce que c’est une Arabe, et mes parents ils disent que les Arabes sont sales, donc c’est une sale Arabe.’ Moi j’étais une petite fille de 10 ans, je ne comprenais pas ce qui se passait, je ne savais même pas ce que c’était une Arabe. » dit-elle
Et d'ajouter :
« Ce jour où je suis devenue quelqu’un d’autre, j’ai été confrontée au pire et au meilleur, à deux réactions dans le fond. Celle de l’exclusion, par la jeune fille, qui était juste happée par le discours de ses parents, et celle de l’inclusion, par la maitresse d’école. Pendant trois mois, sur les récréations, elle est restée avec moi pour me mettre à niveau en français. Et à la fin de l’année, j’ai été classée troisième de la classe. Si elle ne m’avait pas reconnue comme quelqu’un qui avait besoin d’être valorisé comme les autres, peut-être que je ne serais pas au doctorat aujourd’hui, peut-être que je ne serais pas prof. Et tu vois, même si mon fils subira surement aussi de l’exclusion et du racisme dans sa vie, c’est sur des personnes comme elle qu’il faut insister. Celles qui vont combattre le racisme, qui vont tout faire pour que tu sois considéré, quel que soit l’endroit d’où tu viens. »