Publié le 06-03-2018

Interview de Ghazi Zaghbani



Interview de Ghazi Zaghbani

Diplômé de l'Institut Supérieur des Arts Dramatiques de Tunis, promotion 2002, Ghazi Zhagbani a réussi rapidement à se démarquer sur la scène nationale du théâtre. Il est à la fois metteur en scène, auteur et comédien et il a fait parler de lui avec « Swayaa », « Attention travaux ! » et finalement « Poids Plume ». À travers une rencontre sympathique, Ghazi Zaghbani nous vide son sac concernant sa vision artistique, ses projets et ses réussites. Interview.  

 

Tuniscope : parlez nous de votre début au théâtre.

Mes débuts étaient avec le théâtre de l’école. Puis, dans le cadre du théâtre amateur j’ai mis en scène quatre pièces avec l’association « Cardinasse » de Grombalia qui m’a permis de trouver la liberté de mettre en scène et d’expérimenter la vraie création théâtrale. Ensuite, je suis passé à une carrière professionnelle. Donc, j’ai lancé « Artistou Production », société de production. En 2003, j’ai mis en scène « Swayaa » adaptée de La Cantatrice Chauve d'Eugene Ionesco. Puis j’ai enchainé avec « Attention Travaux ! », adaptation de « Fin de Jeu » de Samuel Beckett qui m’a permis de participer au Festival d’Avignon. Entre temps, j’ai joué dans deux pièces en tant que comédien. La première est Antigone, mise en scène par Noureddine El Ati et produite par l'Etoile du Nord. La deuxième est « Et Maintenant », une pièce de « Anouar Chaafi ». Ensuite, je me suis lancé dans l’écriture de « Poids Plume » là où je suis auteur, comédien et metteur en scène.  

 

Tuniscope : pourquoi avez-vous choisi la mise en scène ?

J’ai choisi la mise en scène pour ce qu’elle permet de liberté. Je pense qu’à travers la mise en scène ou encore l’écriture, nous avons le feu vert de dire ce que nous voulons. Effectivement, ce choix est motivé par les multiples pensées que j’ai à l’esprit. Donc, j’utilise la mise en scène pour exposer ma vision, mes petites théories sur la vie, l’homme et la société… cela ne contredit pas le fait que je respecte le métier de comédien, que je le suis moi-même, pour son apport à chaque œuvre théâtrale. 

 

Tuniscope : Votre stage en Coré, a-t-il influencé votre carrière ?

Je pense que chaque voyage ou stage à l’étranger ne peut qu’influencer positivement notre expérience personnelle et professionnelle. C’était vraiment un acquis pour moi de travailler avec un groupe aussi métissé qu’en Corée et surtout de trouver à ma disposition un équipement sophistiqué et professionnel. Le résultat : J’ai réalisé deux comédies musicales ; « Eco of Univers » et « Silk Road » dont je suis fier. Par contre, je n’ai pas encore utilisé l’expertise que j’ai apprise dans « Poids Plume » puisque cette dernière se caractérise, clairement, par une ambiance spéciale.

 

Tuniscope : quels sont les moments qui vous ont les plus marqué sur scène ?

C’est sans doute, en incarnant « Poids Plume » que j’ai senti quelque chose de spécial. En effet, le coup de foudre que j’ai eu avec le personnage et le combat que j’ai fait en tant que comédien pour retrouver la scène après quatre ans d’absence m’ont fortement touché. C’est aussi le bon accueil du public qui m’a touché le plus et qui m’a fait aimer la scène de « Poids Plume ». Le plus important est ce défit ou encore ce léger égoïsme du Ghazi-comédien qui a créé un certain risque émouvant et délicieux que j’éprouve à chaque fois je remonte sur scène en portant la peau de « Kamel ».  

 

Tuniscope : comment avez-vous pensé à écrire « Poids Plume » ?

Au début, j’ai pensé écrire cette histoire pour le cinéma. Donc, c’était un scénario que j’ai voulu réaliser mais devant la lourdeur de la production cinématographique j’ai choisi d’entamer le même projet dans le théâtre. Et c’était parti avec la réécriture du texte, puis avec la mise en scène jusqu’à ce que je me sois décidé de jouer moi-même le rôle de « Kamel ». 

 

Tuniscope : pourquoi avez-vous choisi de jouer vous-même « Kamel » ?

Quand on est comédien, on a parfois le coup de foudre pour certains personnages. J’avoue que j’ai prouvé un fort sentiment envers « Kamel » dont je retrouve plusieurs traits de ma personnalité. Tous les deux, nous faisons notre combat. Tous les deux, nous voulons prouver notre talent et notre existence. Tous les deux, nous sommes passés par des moments cruciaux durant l’enfance et l’adolescence.

En outre, j’ai pensé à d’autres comédiens. Mais le désir de jouer moi-même le rôle m’a vaincu. C’est parce que « Kamel » me charme et j’estime le connaître mieux que les autres.

 

Tuniscope : avez-vous prévu ce succès à « Poids Plume » ?

Bien sur, j’ai prévu ce succès mais avec une petite peur qu’on classe la pièce dans le genre one-man-show. En fait, « Poids Plume » est un monodrame que j’ai voulu plus théâtral en travaillant sur l’humour noir. J’ai prévu le succès de la pièce car l’histoire touche le grand public tout en restant dans un cadre purement théâtrale et fortement professionnel. Dans cette vision, j’ai misé sur le mélange qui s’installe entre la valeur ajoutée artistique et la simplicité pertinente du sujet. Et c’est pour cette raison que « Poids Plume » a été apprécié par le grand public et les critiques au même temps.

 

Tuniscope : quel genre de théâtre défendez-vous ?

Je crois en ce théâtre expérimental et je défends la recherche dans tout travail artistique. Cela n’empêche que je modère chaque expérience théâtrale pour rester accessible au grand public. En effet, « Poids Plume » est l’expression concrète de cette vision car entre expérimentation et classicisme, l’œuvre est le mélange qui plaît à tout le monde.

 

Tuniscope : quels sont les messages clés que nous pouvons tirer de cette pièce ?

« Poids Plume » est l’histoire de Kamel, un boxeur poids plume, qui livre un combat semblable à celui des artistes tunisiens. Le boxeur ou le citoyen passe par plusieurs coups, parfois chaotiques, durant sa jeunesse et surtout son adolescence. Ce qui nous mène à en déduire que chaque preuve dans la vie est l’équivalent d’un round de boxe. Donc nous devons résister, combattre et faire face au refus de la société et de l’autre.

 

Tuniscope : jeune, productif et assidu au niveau qualitatif et quantitatif. Pensez-vous que vous faîtes l’exception de votre génération ?

(Avec un grand sourire) Bien sûr que je suis exceptionnel. J’ai réalisé 6 pièces en amateurs et six autres en professionnel avec deux shows en comédie musicale et je suis en train de produire la septième pièce professionnelle. J’ai une production riche qui m’a permis de se distinguer par rapport aux autres. Toutefois, je pense que ma génération est une vraie mosaïque enrichissante. Nous avons, chacun de son côté, une touche spéciale qui le différencie.

 

Tuniscope : plusieurs pensent que le théâtre tunisien est dans l’impasse. Qu’en pensez-vous ?

Je pense que le théâtre tunisien est toujours présent sur la scène culturelle malgré l’absence d’un grand public. Le théâtre tunisien n’est pas dans l’impasse puisqu’il a une très bonne image à l’étranger. Je suis persuadé qu’une nouvelle renaissance donnera des fruits à tous les niveaux et surtout  pour attirer plus de public au théâtre.  

 

Tuniscope : quels sont vos projets en cinéma ?

Je prépare deux courts métrages ; « Bakhta » et « Jokanda » avec la boite de production « Spérento ». Je suis aussi en plein chantier de l’adaptation de « Poids Plume » au cinéma, comme prévu au début. Au final, on verra un long métrage qui raconte la même histoire qu’on a vu dans la pièce.

 

Tuniscope : pensez-vous conquérir le petit écran ?

En tant que comédien, je n’ai eu aucune proposition sérieuse de valeur. Je pense que le théâtre m’est suffisant, pour le moment, avec quelques essais au cinéma.

 

Tuniscope : quels sont vos projets de théâtre ?

Je présenterais « La partie » dans le cadre de l’avant première à El Teatro. Cette nouvelle pièce que j’ai mis en scène est interprétée par Fatma FELHI, Neji KANAWATI et Hanen CHOKRANI. Je prépare aussi une autre pièce mais je ne veux pas donner de détails.

 

Henda

 

 

 

 


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