Publié le 06-03-2018

Patriotisme et 3ourouba : les intrus de la CAN 2010

La CAN Angola 2010 a, en une semaine, réussi à enflammer les débats. Malheureusement ces débats n’ont pas eu lieu sur le terrain, mais sur les plateaux TV. Patriotisme et 3ourouba se sont invités pour alimenter les analyses sportives. Deux sujets à controverse, car deux sujets mal définis.



Patriotisme et 3ourouba : les intrus de la CAN 2010

La CAN Angola 2010 a, en une semaine, réussi à enflammer les débats. Malheureusement ces débats n’ont pas eu lieu sur le terrain, mais sur les plateaux TV. 3ourouba et patriotisme se sont invités pour alimenter les analyses sportives. Deux sujets à controverse, car deux sujets mal définis.

 

 

Pas de 3ourouba chez les Arabes

Est-ce qu’on peut parler d’un peuple arabe uni? Je me permets de poser cette question après ce qu’on peut qualifier d’incident entre Tarek Dhiab et les égyptiens. (les faits ici)

Je ne vais pas m’étaler sur la réaction égyptienne après les propos de Tarek Dhiab, maintenant on a l’habitude des objections et contrecoups des pharaons. Mais parlons plutôt du fond.

Tarek Dhiab a déclaré qu’Al 3ourouba a été enterrée avec Jamel Abd Nasser. En fait, il a dit tout haut ce qu’on pense tout bas. Cela ne sert à rien de se mentir avec les jolis mots : fraternité et solidarité. Pour une fois, arrêtons de se voiler la face.

Une cause aurait pu réunir les pays arabes : la cause palestinienne. Mais là encore, on rate le coche ! Si les peuples tentent tant bien que mal de déployer des slogans pour la liberté de ce pays, les dirigeants ne sont jamais arrivés à se mettre d’accord… La Palestine trouve plus de soutien de la part des non-arabes -si j’ose dire- (Exemple George Galloway) que des soi-disant pays arabes (exemple l’Egypte qui construit un mûr pour la séparer de Gaza). Pour l’Iraq, personne n’a bougé le moindre petit doigt pour s’opposer à l’invasion américaine. Deux exemples parmi tant d’autres. Alors à quoi bon parler de 3ourouba ? Que veut dire ce mot ?

Je n’essaie pas de jeter de l’huile sur le feu, mais parler de 3ourouba aujourd’hui c’est parler d’une illusion perdue. Combien de sommets avons-nous eu avec la déception au bout des hypocrites réunions de la Ligue Arabe ? A chaque fois, la tentative de solidarité et d’accord se conclut par un échec cuisant. Alors, à force d’échecs, on ne crois plus à cette pseudo-fraternité qu’on tente de nous imposer.

L’Union Européenne s’est construite en dépit des vingt-trois langues différentes.  Les pays arabes, parlent la même langue, mais n’arrivent jamais à se faire comprendre. Un paradoxe d’autant plus surprenant que ces mêmes pays n’ont aucun problème à signer des conventions à droite et à gauche avec des pays « occidentaux ». Cela donne quand même réfléchir.

On parle peut-être la même langue, il y a une religion qui nous réunit par son nom (son application est différente d’un pays à un autre) mais on a une mentalité et des affinités très différentes. Les tunisiens, par exemple, sont plus méditerranéens qu’arabes.

 

Le patriotisme, l’erreur tactique de trop

Hier l’entraîneur de l’équipe nationale de football,Faouzi Benzarti, et pour réagir à une question de Moez Ben Gharbia sur ses choix, lui a opposé le patriotisme à la figure ! On comprend qu’il soit sur les nerfs, qu’il ne soit pas « dans son assiette » après un match aussi médiocre (qui l'était d'ailleurs??), mais lui demander pourquoi il  a opéré à un tel ou tel changement tactique ne sous-entend en aucun cas qu’on doute de son patriotisme. Nous aimons tous notre pays, cela ne nous empêche pas de se demander pourquoi l’équipe nationale n’a pas bien joué. Aimer le pays n’empêche pas de faire des erreurs tactiques, et être patriotes n’empêche pas de critiquer le jeu des joueurs sur le terrain.

« Vous n’avez pas le monopole du cœur » a dit Valery Giscard d’Estaing à François Mitterrand. Moi j’ai envie de dire que personne n’a le monopole du cœur quand il s’agit du pays. Ni ses dirigeants, ni ses citoyens ni les joueurs qui le représentent dans les compétitions internationales. J’ai été surprise d'entendre, sur les plateaux télé des émissions sportives, le mot  « patriotisme » à chaque bout de phrase : Karim Hagui qui se dit plus patriote que les journalistes qui le critiquent. Les journalistes qui déclarent que le joueurs n’ont pas bien joué car la fibre patriotique leur manque. Faouzi Benzarti qui, excédé par les critiques, finit par dire qu’on doute de son patriotisme…Mais c’est quoi ce délire ? 

Si Les joueurs n’ont pas bien joué, c’est parce qu’ils n’ont pas bien préparé la compétition, ne sont pas motivés, ou sont, tout simplement, en dessous du niveau requis. Si les journalistes critiquent la sélection, c’est que cette dernière est très en dessous du niveau attendu et fait pitié quand on la regarde jouer. C’est peut-être simpliste de raisonner de la sorte, mais il vaut mieux raisonner simplement que de se servir du patriotisme pour s’attaquer les uns les autres ou au contraire se défendre.

Le patriotisme c’est le sentiment d’appartenir à un pays et à ses valeurs, le défendre et le critiquer quand il le faut. Ce n’est pas une compétition, et ce n’est pas non plus, un terme qu’on balance à chaque fois que les arguments manquent. 

À bon entendeur!

 

Sarah B.H

 


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