Publié le 06-03-2018

Selim Ben Abdesselem : un autre équilibre doit être trouvé pour les besoins des élus liés à leur mandat

Selim Ben Abdesselem, deputé d'Al Joumhouri, a publié sur sa page Facebook une longue analyse de la polémique autour des salaires des députés.



Selim Ben Abdesselem : un autre équilibre doit être trouvé pour les besoins des élus liés à leur mandat

Tout a commencé au soir du vote de la loi de finances, le 30/12/2012, lorsque le député Nahdha Habib Khédher a présenté à minuit passé un amendement visant à donner au président de l’ANC le pouvoir de fixer les indemnités des députés avec effet rétroactif. Au nom du groupe Démocrate, sa vice-présidente Salma Baccar, et Mongi Rahoui en tant que rapporteur adjoint de la commission des finances, avaient dénoncé cet amendement et annoncé les Démocrates voteraient contre, soulignant qu’il allait ouvrir la voix à la remise en cause de la décision du Tribunal administratif qui avait suspendu provisoirement le versement des indemnités logement et transport des députés sans attendre la décision au fond.


De plus, il était particulièrement choquant de voter une telle mesure à une heure aussi tardive et surtout sans que la présentation de cet amendement n’ait été annoncée auparavant ! L’amendement a donc été voté essentiellement grâce aux voix Nahdha. Toutefois, il n’a pu recevoir application jusqu’alors en raison d’un problème juridique : l’ANC ne disposant pas de l’indépendance financière et administrative (Nahdha s’y étant opposée plusieurs fois), toutes ses dépenses doivent être validées par le chef du Gouvernement !


Mais afin d’éviter toute confusion, deux questions doivent être séparées : celle de l’autonomie financière et administrative de l’ANC qui ferait de son président le chef de son administration et l’ordonnateur de toutes ses dépenses (dont la fixation du montant des indemnités parlementaires et leur versement) et l’éventuel effet rétroactif qui en découlerait et qui conduirait à verser un rappel sur plusieurs mois en fonction de la date de départ.


Et c’est alors que ces derniers jours, en commission de la législation, a été présentée une proposition de loi visant à instaurer l’autonomie administrative et financière de l’ANC, principe justifié en lui-même sauf à maintenir le pouvoir législatif sous la coupe de l’exécutif, et qui dans son article 8 spécifiait que le Président de l’ANC disposait du pouvoir de fixer les indemnités des députés mais avec possibilité de donner un effet rétroactif à cette décision. Et c’est à ce point que faisait allusion Mongi Rahoui en parlant des fameux 7 à 8 milles de DT de rappel pour les élus et d’un montant bien supérieur attribué Mme Maherzia Lâabidi en sa qualité de vice-présidente de l’ANC. Toutefois, la commission de la législation générale, qui a commencé l’examen de ce texte, semble s’orienter vers l’abandon de la possibilité d’un effet rétroactif d’une telle décision. Tout est peut être plus clair à présent, mais cette explication un peu longue comme d’habitude m’était apparue nécessaire pour plus de clarté.


La question posée dépasse donc le seul aspect lié à la prise en charge des dépenses des élus au regard du contexte économique et social très difficile de la Tunisie avec un taux de chômage et de précarité et des prix des produits de base particulièrement élevés. Aussi, ce qui aurait pu paraître normal ou acceptable dans un contexte économique et social meilleur ne l’est pas dans ces conditions.


Il va donc de soi qu’un autre équilibre doit être trouvé en vue de prendre en compte les besoins des élus liés à leur mandat, tout en empêchant que les sommes versées dans un but bien spécifique (logement ou déplacement) ne soient utilisées à d’autres fin, avec application de sanctions en cas d’absence non justifiée par un motif sérieux.


Bien que plus compliqué à mettre en œuvre, le système le plus indiqué pourrait donc consister en une indemnité de base peut être légèrement réduite en période d’austérité, avec prise en charge des dépenses spécifiques sur présentation de justificatifs. Il serait aussi le plus juste pour répondre aux besoins des élus qui assument leur mission sans avantager indûment ceux qui la délaissent et qui devraient faire l’objet de retenues financières.


C’est sans doute à ce prix que le discrédit touchant la politique tunisienne vis-à-vis de l’opinion pourrait être atténué, car je n’ose pas penser qu’il puisse être totalement résorbé après autant de déceptions dues aux résultats peu reluisants affichés par l’ANC et le gouvernement.


Nul doute que cette question occupera encore une bonne partie de l’ouverture de la séance de mardi matin lorsque Mongi Rahoui, après s’être exprimé dans les médias, pourra enfin s’expliquer en séance en s’attirant sans doute bien des réactions hostiles, ce qui retardera d’autant la reprise des travaux sur le texte sur l’instance provisoire de la magistrature.


On commence à être habitués…


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