Publié le 06-03-2018

Inland : un exil dur à vivre et à voir

Inland, le long-métrage de l’Algérien Tariq Teguia a été l’un des deux films inaugurateurs de « Migration et Exils dans les cinémas arabes », un cycle qui se tient du 20 au 25 janvier 2010 au CinémAfriCart. Projeté dans la soirée du 20 janvier, le film repassera le lendemain à 18h30.



Inland : un exil dur à vivre et à voir

Inland, le long-métrage de l’Algérien Tariq Teguia a été l’un des deux films inaugurateurs de « Migration et Exils dans les cinémas arabes », un cycle qui se tient du 20 au 25 janvier 2010 au CinémAfriCart. Projeté dans la soirée du 20 janvier, le film repassera le lendemain à 18h30.

 

Après avoir dépassé le choix de l’heure de la séance (21h !) et le désappointement suite à l’annonce de l’absence du réalisateur du film pourtant prévu à la participation, les présents ont eu à survivre à 2h20 du plus épuré des Tariq Teguia. 90% de la salle a tout de même tenu jusqu’au bout. C’est dire que notre thermomètre cinéphilique ne connaît pas les degrés moindres ! Surtout quand c’est le CinémAfricArt qui mesure la température.

 

Pour aborder le cinéma de Tariq Teguia, il faut le placer dans son contexte. Ce contexte est fait du genre cinématographique dans le lequel il s’inscrit ainsi que du parcours et des choix artistiques de son faiseur. Ce dernier est issu d’études universitaires en philosophie et en arts plastiques. Il est surtout le maître d’un art très imprégné par ses travaux sur la photographie et ses techniques, effectués entre l’Algérie et la France. Son cinéma offre de ce point de vue de larges champs d’expérimentation pour l’esthétique de l’image et l’écriture cinématographique. Monsieur Ikbal Zalila, critique et enseignant de cinéma n’a pas manqué de le souligner en présentant le film, comme il a qualifié Inland de « difficilement commercialisable en Tunisie ». Chose à laquelle nous adhérons surtout que Rome plutôt que vous (Rouma walla Entouma, 2006), le premier long métrage de Tariq Teguia, n’a été vu dans nos salles obscures que dans le cadre des dernières Journées Cinématographiques de Carthage.

 

L’immigration est un thème qui semble hanter Tariq Teguia et qu’il aborde dans son cinéma d’une manière très personnelle caractérisée par la récurrence d’éléments comme la parité (un homme et une femme), le désert et une guerre encore omniprésente et pesante, plusieurs années après son estompement . Si dans Rome plutôt que vous, un algérois et une algéroise cherchent un moyen de quitter le pays et s’offrent un dernier « trip » dans le désert ; dans Inland, c’est la rencontre entre un exil intérieur- exil de l’être incarné par le personnage de Malik- et entre la volonté de s’établir dans une autre lande où peuvent pousser les rêves, que représente « la fille » : une noire africaine de passage en Algérie comme relais vers le Maroc, passage obligé pour l’immigration en Espagne. Ensembles, ils vont effectuer une traversée du désert dans ce qui est le processus inverse à l’exil et à l’immigration : retour vers soi et retour sur soi.

 

Tariq Teguia a cette manière de raconter l’itinéraire des plus terriens des humains (Malik est un topographe d’où le rapport évident à la terre et la fille est une immigrante) tout en lui donnant la dimension d’une quête spirituelle. Il a aussi la souplesse et la subtilité de filmer l’un et l’autre des personnages et des dimensions sans les égarer l’un de l’autre, tout en crevant l’écran de la lourdeur du process. L’empreinte du photographe qu’est Teguia s’étale sur tout Inland. Les plans du film en font une espèce de défilé de clichés, ce qui revient à la définition même du cinéma. Non seulement y a t il une prédominance de plans fixes, les personnages dans le plus clair de la durée du film  et jusqu'avant sa dernière partie, bougent rarement et lentement dans le cadre. La quête inversée ne demande pas plus pour aboutir !   

 

Un film qu’il faut regarder mais surtout voir. Un film qui nous rappelle qu’il faut savoir regarder pour voir. 

 

 

Narjes


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